
Tu vois ce collègue toujours en train de bosser, même pendant la pause ? Celui qui a du mal à déléguer, qui peine à célébrer ses réussites, et qui semble penser qu’un bon travail… c’est forcément un travail difficile ? Il est peut-être sous l’influence d’un driver bien connu : « Fais des efforts« .
Et toi ? Si tu ressens que tout doit être compliqué pour être valable, si tu culpabilises quand les choses te semblent trop faciles, cet article est pour toi.
C’est quoi un driver, déjà ?
Petit rappel pour les nouveaux (et pour les têtes en l’air) : un driver, en analyse transactionnelle, c’est un message implicite, souvent hérité de l’enfance, qui influence notre manière d’agir, de penser, de réussir. Il y en a cinq principaux :
- Sois parfait
- Sois fort
- Fais plaisir
- Dépêche-toi
- Fais des efforts
Aujourd’hui, on zoome sur ce dernier, qui, sous ses airs de moteur motivant, peut vite devenir un frein puissant.
Il ne s’agit donc pas d’éradiquer les comportements liés mais plutôt de les modifier lorsqu’ils interviennent à un moment non approprié.
Sans compter que nous activons souvent 2 voire 3 drivers en même temps …
Le message contraignant du ‘’Fais des efforts’’
Ce driver s’installe souvent très tôt. L’enfant entend (sans qu’on le dise forcément avec ces mots) :
« Si c’est trop facile, c’est que tu n’as pas assez travaillé. »
« Tu dois mériter ce que tu obtiens. »
« Il faut souffrir pour réussir. »
Résultat ? Une croyance s’ancre doucement : la valeur réside dans l’effort, pas dans le résultat. Tu peux être hyper efficace, mais si ça n’a pas été difficile, tu ressens comme un malaise. Comme si tu avais triché.
C’est un peu comme si tu refusais de prendre l’autoroute pour absolument faire le trajet par les petites routes, même si t’as une Ferrari.
Les points forts du ‘’Fais des efforts’’
Je vais vous raconter l’histoire de Claire, une commerciale terrain dans l’agroalimentaire.
Claire, c’est la machine de guerre de l’équipe. La fille qui ne lâche rien. Tu l’envoies sur un compte compliqué ? Elle y retourne, encore et encore, même après trois refus. Elle est capable de passer des heures à creuser une problématique client que d’autres auraient balayée d’un « c’est mort ». Claire croit dans l’effort, dans la ténacité. Et ça marche : elle transforme des leads tièdes en clients fidèles.
Un jour, le directeur commercial dit en réunion :
« Claire, je ne sais pas comment tu fais, mais tes clients t’adorent. Tu dois avoir un secret. »
Elle sourit et répond :
« Je crois qu’ils sentent que je ne lâche pas. Je ne suis pas là pour vendre, je suis là pour creuser, comprendre, trouver LA solution, quitte à y passer plus de temps que prévu. »
Claire, c’est l’illustration vivante de ce que le driver « Fais des efforts » a de plus beau à offrir :
- Elle persévère là où d’autres abandonnent.
- Elle apprend vite, parce qu’elle cherche vraiment à comprendre, pas juste à performer.
- Elle inspire le respect par son implication sincère.
- Elle donne le sentiment qu’elle mérite chaque deal, et c’est aussi ce qui crée la confiance.
Et parfois, dans certains contextes complexes ou face à des clients méfiants, cette capacité à aller au bout de l’effort fait toute la différence.
Les points de vigilance du ‘’Fais des efforts’’
Mais voilà, Claire a aussi un revers de médaille… qu’on a vu ressortir lors d’un projet en équipe.
Elle devait travailler avec Julien, un collègue plutôt agile, rapide, adepte du « moins mais mieux ». Ensemble, ils devaient construire une présentation pour un appel d’offres. Claire y a passé quatre soirs, jusqu’à 22h. Julien, lui, avait tout calé en une demi-journée.
Quand ils ont présenté à leur N+1, la proposition de Julien, simple et claire, a été préférée à celle de Claire, trop dense, trop détaillée. Son manager lui a glissé :
« C’est super complet, Claire, mais peut-être un peu trop. On va perdre le client. »
Claire a accusé le coup. Elle a réagi avec cette phrase typique :
« J’ai bossé comme une folle… et ce n’est pas ça qu’on valorise. »
Le problème, c’est qu’en valorisant l’effort plus que l’impact, Claire est tombée dans le piège de son driver.
Et c’est là que le « Fais des efforts » peut devenir un handicap silencieux :
- Il pousse à en faire trop, parfois au détriment de l’essentiel.
- Il peut ralentir les décisions : on retravaille, on retravaille encore… et on rate le timing.
- Il empêche la reconnaissance de la réussite quand elle a été fluide : « Ce n’était pas si dur, donc ce n’est pas mérité. »
- Il provoque parfois des tensions dans l’équipe, avec ceux qui vont droit au but : « Tu fais le minimum, toi ? »
- Et surtout… il épuise. Petit à petit. Jusqu’au moment où l’envie de bien faire devient une fatigue profonde.
Accompagner un ‘’Fais un effort’’
La situation n’est pas plus simple pour le manager d’un profil sous l’emprise du « Fais des efforts ». En apparence, ce collaborateur est un rêve éveillé : engagé, impliqué, volontaire… mais attention : il avance souvent en mode “sac à dos rempli de pierres”, persuadé que plus il en bave, plus il progresse.
Et jusqu’au jour où… ça craque.
Trop d’efforts, trop peu de reconnaissance, trop peu de résultats visibles. Il risque alors de plonger dans une spirale de fatigue, de frustration, voire de démotivation profonde.
C’est pourquoi, si vous devez accompagner un ‘’Fais des efforts’’, voici quelques leviers concrets à activer, selon la méthode des petits pas :
- Aidez-le à distinguer effort et valeur
Ce qu’il valorise, ce n’est pas tant le résultat, mais la sueur versée pour y parvenir.
Travaillez avec lui sur cette croyance limitante : « Ce n’est valable que si j’en ai bavé ».
Posez des questions comme :« Et si le plus dur, c’était justement de réussir simplement ? »
Proposez-lui un exercice : sur un projet qu’il a réussi, demandez-lui de lister ce qui a bien fonctionné parce que c’était fluide, et pas parce que c’était difficile. Reprogrammons la perception du succès.
- Apprenez-lui à se reposer sans culpabiliser
Il a du mal à s’arrêter. Même en vacances, il « termine un dernier truc vite fait« .
Montrez-lui que le repos fait partie de la performance. Que l’on ne gagne pas un marathon en courant des sprints.
Instaurez un rituel simple : chaque semaine, il doit noter une action qu’il a menée sans difficulté, et la célébrer. C’est inconfortable au début, mais nécessaire pour ancrer de nouvelles références.
- Entraînez-le à chercher la simplicité
Le ‘’Fais des efforts’’ a un talent caché : transformer une tâche simple en odyssée épique.
Apprenez-lui à aller à l’essentiel. Mettez-le en mode « minimum viable ».
Posez-lui cette question magique :« Et si tu n’avais qu’une heure pour le faire, que choisirais-tu de garder ? »
Proposez-lui une mission en binôme avec un profil plus pragmatique ou orienté « résultat rapide ». Le choc des cultures sera très formateur… s’il est bien accompagné.
- Responsabilisez-le sans le laisser s’enliser
Limitez les missions où il risque de « s’y noyer ». Mieux vaut plusieurs petites étapes bien cadrées qu’un gros projet flou où il va se perdre dans les détails.
Proposez-lui un cadre structuré, avec des jalons réguliers et des consignes de temps : « Tu as deux heures pour cette partie, pas plus. Ce qui n’est pas fini ne sera pas indispensable. »
Il apprendra à faire confiance à l’inachevé utile.
- Déculpabilisez-le sur la réussite « facile »
Il a besoin d’entendre, et de réentendre, que l’intelligence ne se mesure pas à la souffrance, mais à la pertinence et à l’impact.
Lors de vos points réguliers, prenez 5 minutes pour évoquer non seulement ce qu’il a accompli, mais aussi comment il l’a vécu. Aidez-le à nommer ses ressentis, pas uniquement ses tâches.
Si vous vous retrouvez dans ce driver « Fais des efforts », rappelez-vous…
« Ce n’est pas parce que c’est fluide que ce n’est pas mérité. Ce n’est pas parce que c’est simple que ce n’est pas brillant. »
Et comme le dit souvent l’équipe Hominance : Travailler dur, c’est bien. Travailler juste, c’est mieux.
Si vous souhaitez travailler sur vos drivers pour gagner en efficacité et en sérénité, contactez-nous.